Ingénieur, le métier qui lui a donné des ailes
Patrick Villa est à la tête d’un atelier de fabrication clé qui tourne sept jours sur sept, au sein de l’entreprise la plus florissante de Wallonie, dans le secteur de la construction aéronautique. Son maître-mot ? La passion de son travail.
« Si je devais me rendre à l’usine avec des pieds de plomb, alors je m’efforcerais de changer de boulot, au plus vite ». Une confidence qui résume très bien l’état d’esprit qui anime cet ingénieur industriel dynamique de 40 ans, marié et père de deux enfants, diplômé de l’institut Gramme, à Liège. Patrick Villa œuvre énergiquement au sein de Techspace Aero, branche importante du groupe industriel Safran. Il est responsable de la ligne de production « Fan & Drum ». Manager « soft » dans l’âme - pour lui, en effet, élever le ton lorsqu’il s’agit de recadrer un collaborateur « est inutile et vous enlève tout crédit », il gère, au quotidien, une grande équipe constituée de 45 collaborateurs ( !), ouvriers et employés. Il a pour mission, en outre, de résoudre les problèmes techniques survenant au niveau des produits et machines. Il participe à la prise de décisions stratégiques et anime des «groupes de progrès » par le truchement desquels lui et ses collègues tendent à accroître leurs performances.
Un parcours tout tracé ?
Patrick Villa garde un très bon souvenir de son prof de mathématiques (Athénée de Malmedy) « qui a bien stimulé les élèves », selon lui. Certes, ce passionné d’aviation était particulièrement brillant en maths et en sciences, ce qui, selon lui, constitue une bonne prédisposition aux études d’ingénieur. Dans « son » auditoire de Gramme, au début de son cursus, on ne dénombrait que cinq jeunes femmes – « au caractère trempé et redoutable », souligne-t-il - sur 180 étudiants (…).
Sa propre définition du métier d’ingénieur ? « Une profession qui apprend à solutionner ». Patrick nous confie qu’il a toujours été très habile de ses mains. Enfant, il s’adonnait à des jeux « intelligents ».
Fleuron industriel wallon
Bastion historique de l'industrie wallonne, la province de Liège conserve quelques fleurons comme Techspace Aero (Safran Group), la Câblerie d'Eupen, Corman, CMI ou encore la célèbre FN d’Herstal. Techspace Aero, dont le service public de Wallonie détient actuellement plus de 30% de l’actionnariat, est une société de techniques avancées qui se situe dans l'agglomération liégeoise, au sein du gigantesque parc industriel des Hauts-Sarts. L’entreprise de pointe conçoit, développe et fournit des modules, équipements et bancs d’essais pour moteurs aéronautiques et spatiaux. Ainsi, contribue-t-elle au succès des vols de nombreux Airbus (A320, A330, A340, A380, A400M), Boeing (B737, B747, B767, B777, B787), Embraer (190) et d’autres encore.
299 collègues ingénieurs !
Avec plus de 400 ingénieurs et techniciens (300 ingénieurs), l’entreprise Techspace Aero consacre près de 20% de son chiffre d’affaires ( !) à la recherche et au développement, en collaboration étroite avec les universités et centres de recherche belges, en privilégiant l’intervention de bureaux d’études et d’entreprises locales.
Surtout, ne jamais s’ennuyer !
Ce qui constituerait un signal tout de même assez inquiétant… Pour ma part, j’accomplis un métier qui me passionne beaucoup. Je suis passé quasiment par toutes les fonctions de l’entreprise et j’ai bien la volonté de continuer à progresser. Lorsque j’ai mené à bien un projet, j’ai hâte d’en réaliser un autre et d’apporter le fruit de mon expérience à cette nouvelle fonction, dans l’intérêt de la société qui m’a engagé. Après toutes ces années passées ici, je reste curieux, motivé et, effectivement, passionné. Je ne m’ennuie jamais. Le plaisir est très important dans la pratique de son métier, de tous les métiers d’ailleurs, d’une manière générale.
Pourtant, la Belgique manque d’ingénieurs…C’est une réalité qui me surprend beaucoup. En effet, j’exerce un très beau métier. Il ouvre énormément de portes. C’est vrai : il y a encore trop peu d’ingénieurs, chez nous. La meilleure preuve est que j’ai de nombreux collègues qui viennent de France, d’Espagne et de bien d’autres régions du monde. Je ne m’explique pas pourquoi il y n’y a pas davantage de jeunes qui sont attirés par la formation d’ingénieur. Pourtant, la Belgique s’est, de tous temps, rendue célèbre également par ses grands ingénieurs, dans le monde entier. D’une part, je pense qu’il n’y a toujours pas assez de visites et de stages effectués dans les entreprises où les ingénieurs occupent une place de choix. Cela manque. |
Impliquer davantage les écoles (!) D’autre part, je pense qu’il est toujours nécessaire de démystifier le métier d’ingénieur. Il est indispensable d’éradiquer cette image obsolète du super mécanicien qui peut tout réparer. Cette vision est fausse et rendrait le métier très élitiste ou difficile à assumer, alors que cela n’est pas du tout le cas. Des efforts doivent être accomplis, encore, en matière de promotion de la profession d’ingénieur. Cette mission incombe aux écoles, dès les premières années du cycle secondaire, par le biais de professeurs qui puissent initier des « mini conférences » ou organiser des séances où les ingénieurs parlent de leurs expériences. Pour ma part, je suis tout à fait prêt à consacrer du temps à cette mission. Hélas, cela se pratique très peu. A l’heure actuelle, les contacts s’établissent avec les étudiants lorsque ceux-ci sont quasiment diplômés. Or, c’est bien trop tard…
Gagne-t-il bien sa vie ? Pour ma part, je suis satisfait du montant de ma rémunération. Ayant travaillé au sein de grandes sociétés et dans de petites entreprises, occupant des fonctions sensiblement équivalentes, j’ai observé que le niveau de mon salaire faisait du yo-yo. Le montant dépend de la commission paritaire, du secteur d’activité. Mais, le plaisir que je ressens au travers de mon métier passe avant mes attentes d’ordre financier. Car, en accomplissant quelque chose de plaisant, le temps passe vite alors qu’on progresse, qu’on s’amuse, presque.
|